extrait du sixième roman publié en 2013 et se déroulant dans le Lot

...
Je ne pouvais pas croire...

XXXXVI Ma version officielle

L’homme libre réécrit l’Histoire, toujours. L’inspecteur Delattre m’écoutait plus qu’il questionnait :
- Je ne pouvais pas croire qu’un mec comme Kader se laisse happer comme une crêpe dans une bétonnière. Je l’ai vu cent fois prendre une poignée de béton sans même une égratignure. Je suis passé le matin, il était en pleine forme. Nous avons bu une bière.

Et c’est en racontant que le scénario de cette journée m’est vraiment revenu. J’enchaînais comme je le découvrais dans ma tête. Tout s’éclairait. Après coup. Mais je n’allais quand même pas gâcher cette occasion de briller !

- C’est vendredi que je me suis rappelé. Si je vous avais téléphoné pour vous signaler que ce jour-là, je m’étais endormi dans le canapé après avoir bu une bière chez Kader et retraversé la forêt, vous auriez sûrement considéré que je vous dérangeais pour pas grand-chose, vous n’auriez pas cru devoir surveiller cette maison.
- Peut-être, mais visiblement j’aurais eu tort ! On sait dans notre métier que le plus souvent les enquêtes se résolvent ou non grâce à la prise en compte des bons ou des mauvais détails... Je vous écoute.
- Mercredi, ce fut l’incinération. Nadège m’a semblé étrange. Nous y sommes allés ensemble. Au retour, alors que je lui proposais de rester avec elle un moment, elle s’est presque sauvée de la voiture. Jeudi, je suis passé pour prendre de ses nouvelles, tout était fermé mais leur, enfin, sa voiture était là, elle y est toujours.... Et c’est hier que je me suis souvenu de l’état dans lequel une bière m’avait mis... Mais quelque chose ne fonctionnait pas : je ne vois pas Nadège et ses peut-être même pas cinquante kilos basculer Kader dans une bétonnière... Kader et Nadège sont mariés depuis peu et pour résumer, il l’a chipée à un mec que je n’ai jamais vu, un certain Pablo, avec qui il semble y avoir eu des remous là-haut... J’ai téléphoné à la mère de Kader pour prendre de ses nouvelles mais également pour lui demander si elle en avait de Nadège. Je l’ai questionnée sur ce Pablo... et il lui sembla qu’il n’était plus dans la cité depuis plusieurs jours. Tout devenait plausible : si une bière sûrement droguée m’a mis KO pour quelques heures, Kader fut littéralement assommé avec trois... Le pack n’en contenait plus que deux le lendemain matin... et de là à penser que Nadège soit toujours restée liée avec Pablo, qu’elle se soit mariée avec Kader pour l’argent, un mariage dont personne ici sauf madame et monsieur Hanin ne connaissait l’existence, et qu’ils aient décidé de rapidement supprimer Kader, voilà tout ce qui m’a traversé la tête d’apprenti enquêteur !
- Plausible. Un ministre avait suggéré de présenter les cas les plus épineux à des romanciers. Votre manière d’aborder les scénarios pourrait souvent nous aider. Mais les budgets manquent... donc quand nous pouvons obtenir des aides bénévoles nous les acceptons ! En tout cas, la fille est partie immédiatement aux examens, elle semblait complètement droguée et quand elle a repris ses esprits, elle était ravie d’être arrêtée... Savez-vous ce que sont devenues les deux bières ?
- Aucune idée.
- Entre le moment où vous avez découvert le... disons corps et notre arrivée, auraient-elles pu être subtilisées ?
- Je n’ai vu personne et Nadège semblait trop perturbée pour penser à cela... mais on ne sait jamais... je crois que c’est une bonne actrice...
L’inspecteur avait sorti son Smartphone et se concentrait sur son écran...
- Encore un détail qui nous aurait permis de chercher un coupable plus rapidement : les deux bières fermées se trouvent bien à côté de la bétonnière sur mes clichés. Il ne faut jamais perdre de vue qu’un crime est toujours possible et s’arrêter sur chaque indice, même quand l’horreur d’une scène ne peut pas laisser insensible.



Ajouter une info ou un commentaire



Voir sujet précédent du forum
Si vous souhaitez aborder un autre sujet : Vous pouvez débuter un nouveau sujet en respectant le thème du site.